LA PHOTO AVEC UN SMARTPHONE
Le mystère de la chambre noire, l'invention de l'appareil photographique, c'était il y a longtemps.. Je vous parle d'un temps que les moins de 200 ans, ne peuvent pas connaître.
Les nouvelles technologies évoluent vite, très vite. La prise en charge de la fonctionnalité photo par un iPhone (2007) puis des smartphones, a favorisé une profonde mutation des pratiques de la photographie.
L'engouement pour la prise de vue avec un smartphone amène certains à prédire la mort de l'appareil photo.
Il ne s'agit pas ici d'entrer dans le débat qui oppose deux camps (smartphone ou APN) dont les arguties ne sont que des supputations interprétées dans le marc de café.
Néanmoins, ce phénomène mérite notre attention. Regardons les faits.
LE SMARTPHONE
● La très petite taille du capteur d'un smartphone limitait la qualité de l'image et les performances. Les fabricants ont contourné cet obstacle en intégrant 3 voire 4 capteurs, avec chacun une spécificité (capteur principal, grand angle, profondeur, macro) Marketing ou réel progrès ? Les tests confirment l'utilité de plusieurs capteurs mais les résultats sont inégaux selon les modèles. Cette solution technique représente un moindre coût pour les fabricants par rapport à l'option d'un plus grand capteur. L'évolution technologique permet désormais d'améliorer les performances.
● Un public non averti s'imagine que plus un capteur contient de pixels meilleure sera la qualité. Pourquoi un capteur principal de smartphone de 30 Mpx peut se montrer moins efficace que celui avec 12 Mpx ?
Un capteur est composé de photosires. Dans un capteur classique à matrice de Bayer, il faut 4 photosites pour créer 1 pixel. Plus le capteur contient de photosites plus la densité au mm² augmente. Plus la densité au mm² est élevée, plus la sensibilité à la lumière diminue : gestion difficile des basses et hautes lumières, du rapport signal/ bruit.
Prenons mon exemple : je possède un APN avec capteur plein format 20 Mpx (ISO 102400 extensibles 204800) et un smartphone avec capteur 1/1,97″ 64Mpx (ISO 6400). Lequel maintient l'équilibre entre qualité d'image, hautes performances ISO et taille de fichiers : le capteur avec 64 MPx (pixel = 0,7 μm) ou celui avec 20 Mpx (pixel = 8,6 μm) ?
capteur plein format (24 mm x 36 mm)
capteur 1/1,97" (4,8 mm x 6,4 mm)
● Divers fabricants, optant pour un nombre élevé de pixels sur le capteur d'un smartphone, utilisent la technique du pixel-binning. Cette technique consiste à associer plusieurs pixels adjacents (exemple : le Xiaomi 12T pro : capteur 1/1,22" 200 Mpx, Super pixel 16 en 1). De fait, dans le but d'améliorer les qualités d'une photo soit en l'éclaircissant, soit en améliorant son niveau de bruit, les 200 Mpx annoncés pour ce capteur (taille pixel = 0,64μm) produisent après regroupement en réalité un fichier image de 12,5 Mpx (taille pixel = 2,56 μ). Cette ingénieuse astuce améliore la qualité de l'image, cependant elle ne permet pas de rivaliser avec un grand capteur (exemple Canon EOS R6 capteur 24x36, 20 Mpx, taille pixel = 8,6 μm). En basses lumières, le capteur avec des pixels de 8,6 μm offre une bien meilleure sensibilité.
● Le format image utilisé dans les smartphones est en général du JPEG lequel utilise la compression avec perte irréversible de données, d'où un format non adapté au post-traitement. Le format HEIF (ou HEIC chez Apple) moins volumineux et offrant une image de meilleure qualité que le JPEG, permet le post-traitement. Les fabricants adoptent désormais l'HEIF. Quant au format RAW, très peu de téléphones mobiles proposent ce format.
● Quel que soit l'appareil, le capteur ne suffit pas pour déterminer la qualité image. Il est indissociable du couple capteur/processeur. La qualité finale de l'image dépend des performances du processeur, de la précision et du mode de calcul des algorithmes (Intelligence Artificielle).. C'est l'une des raisons pour laquelle la note attribuée à la fonctionnalité photo accuse d'importantes différences d'un modèle à l'autre.
● Même si les performances en photo deviennent de plus en plus des critères de choix pour les utilisateurs d'un smartphone (ou iPhone), la majorité du grand public n'en fait pas une priorité.
LES CHIFFRES
● La progression exponentielle du nombre d'utilisateurs des plateformes, réseaux sociaux, services marchands en ligne, pour la gestion des photos (sauvegarde, impression, traitement de l'image, diffusion, ...) révèle une nouvelle physionomie de la photographie.
● Le marché des APN subit de plein fouet les nouvelles tendances : forte baisse des ventes des appareils entrée de gamme, en particulier les compacts, en revanche, la catégorie des hybrides, s'enrichit de modèles de plus en plus performants, lesquels maintiennent un équilibre du marché des APN
● Malgré les chiffres avancés par des organismes de statistiques quant au nombre de photos prises sur une période donnée dans le monde (impossibilité à quantifier objectivement à l'échelle mondiale) des indicateurs nous montrent un véritable engouement pour la photo. .
LES RÉSEAUX SOCIAUX

● Qui diffuse ses photos ses photos dans les réseaux sociaux ?
- des professionnels afin d'élargir leur potentiel commercial,
- des amateurs en quête de pouces en l'air,
- des adeptes du m'as-tu-vu s'affichant dans des selfies (trop souvent insipides),
- des amateurs aimant partager leur passion,
- une multitude de profils.
● Un constat indiscutable : la photo aujourd'hui se pratique de plus en plus avec un smartphone dont les principaux avantages sont la disponibilité, la connectivité et la facilité d'utilisation. L'appétence pour figer des images du quotidien, pour immortaliser un souvenir, un événement, un fait quelconque, gagne un large public. L'abondance des photos diffusées sur le Net présente le meilleur, mais aussi, sans complexe, le pire. Ce constat est révélateur. Les pratiques de la photographie, en peu d'années, ont bouleversé le monde de la photo.
LES PRATIQUES DE LA PHOTOGRAPHIE
Certes, le smartphone a intensifié l'essor de la photographie sous diverses manières : plaisir de créer, de figer des instants de vie dont la principale motivation est le partage. ....
Il a suscité, aussi, une nouvelle pratique dont la photo n'est qu'un prétexte : un nouveau langage, un nouveau moyen de communication pour photographier en 3 gestes (sortir l'appareil de sa poche, cliquer sur un bouton, transférer l'image vers un réseau social). Cette pratique de la photographie porte désormais un nom : la phonéographie.
Et les codes, les règles, les techniques ? Çà n’intéresse pas ce public. Une pratique caractérisée par l'absence de recherche de l'art photographique, à connotation négative quand les dérives rejettent la réglementation relative à la photographie (droit d'auteur, droit à l'image ...), bafouent la bienséance et le respect d'autrui (diffusion de photos dans l'intention de nuire à quelqu'un).
Il est intéressant d'observer les phénomènes de notre société, mais cela ne doit pas faire oublier les questions que chacun doit, au préalable, avant de diffuser, se poser pour lui-même.
- je fais des photos, pour qui ? pourquoi ? dans quel but ?
- de quel matériel ai-je besoin ?
- mes photos traduisent-elles mon point de vue, mon intention ?
- comment progresser ?
- pourquoi diffuser sur Internet ? pour quel public ?
CONCLUSION
OUI, la fonctionnalité PHOTO d'un smartphone permet aujourd'hui d'obtenir des résultats de bonne qualité, à tel point que l'achat d'un appareil photo compact entrée de gamme (jusqu'à 300€) devient inutile.
Si l'on choisit un smartphone (ou iPhone) pour ses performanes en photo, mieux vaut s'orienter vers un modèle à partir de 700€. En revanche, à l'exception de quelques rares appareils, la note en vidéo atteint péniblement la moyenne.
Au final, le avantages de la photographie avec un smartphone séduisent un large public : de l'utilisateur lambda, occasionnel, pratiquant la photo sans la moindre connaissance, à l'utisateur plus expérimenté, voire professionnel.
Et demain ? Smartphone et/ou APN ? Une certitude : les fabricants s'ingénient à innover en ajoutant de nouvelles fonctionnalités, en faisant évoluer la technologie, en améliorant les performances.
Quels que soient le matériel utilisé et le niveau de culture photographique de chacun, la pratique de la photographie doit toujours rester un plaisir.

